
Au Magasin des suicides, on vend des kits pour les désespérés. Tout va pour le mieux dans le pire des mondes. Voilà que débarque Alan, le fils cadet, un éternel optimiste. Quand on a des parents qui se régalent de la mort des autres, pas facile de trouver sa place ! Et puis, c’est mauvais pour les affaires…
Adaptation d’un roman de Jean Teulé, j’ai été plutôt séduit par cette bédé. Je n’ai pas lu le roman, mais j’ai pris un certain plaisir à cette lecture. Je me contenterai donc de juger le produit fini tel quel, comme s’il s’agissait d’une œuvre originale… et « originale », elle l’est sans aucun doute…
Créer un univers en huis-clos (tout se passe dans le magasin) où le désespoir s’impose en norme est une excellente idée de départ permettant à un humour noir et pince-sans-rire de donner toute sa mesure, sans tomber pour autant dans la méchanceté. Les dialogues, d’une extrême drôlerie, m’ont fait pouffer à plusieurs reprises.
Certes, on peut arguer que le style de dessin manque de caractère et n’est pas transcendant, que ça fait déjà-vu, mais il n’est néanmoins pas déplaisant et reste adapté pour ce type de récit à caractère littéraire. On peut arguer aussi que certains passages manquent parfois de rythme, mais ça se lit quand même très bien. La petite trouvaille graphique, certes facile, qui pouvait difficilement apparaître dans le roman consiste à avoir mis des couleurs vives sur le personnage joyeux d’Alan, cerné par des tons sombres et tristes. Les couleurs en question prennent de plus en plus d’ampleur au fil du récit, tandis que le jeune garçon « contamine » tous les membres de sa famille par sa bonne humeur.
Le titre pourrait rebuter ou ceux qui refusent de voir en eux leur côté sombre, mais en ce qui me concerne, il me semble que cette histoire devrait logiquement avoir sur la plupart d’entre nous l’effet d’une potion euphorisante. On peut y voir aussi une parabole sur notre époque morose et ennuyeuse, destinée à recadrer le grincheux désabusé qui sommeille en nous. [septembre 2013]
Le Magasin des suicides
Scénario : Olivier Ka
Dessin : Domitille Collardey
Editeur : Delcourt
48 pages – 15,50 €
Parution : 05 septembre 2012