
États-Unis, fin du XIXe siècle. Le jour où le jeune capitaine Elijah Twain recueille à bord de son bateau une sirène blessée, sa vie va s’en trouver changée à jamais. Soignée clandestinement dans sa cabine par le capitaine, la sirène se fait muse et lui redonne le goût de l’écriture. Mais qui a pu la blesser de la sorte ? Et comment expliquer le comportement étrange de Bienvenu Lafayette, propriétaire français de la compagnie, qui semble uniquement préoccupé par le nombre de ses conquêtes féminines ? Au fil de leur voyage sur l’Hudson, Elijah va mener son enquête, tiraillé entre son amour naissant pour la sirène et son attachement à Pearl, son épouse de santé fragile, qui a dû rester à terre.
Si la couverture constitue à elle seule une invitation à se plonger (c’est vraiment le cas de le dire) dans ce pavé en forme de conte fantastico-romantique, les premières pages pourraient provoquer chez certains lecteurs un mouvement de recul, comme ce fut le cas pour moi. Je veux parler du dessin dont le style est assez disparate. Mark Siegel recourt à un crayonné charbonneux qui confère une ambiance surannée parfaitement adaptée au contexte. S’il maîtrise plutôt bien la technique pour représenter les paysages et les décors, et ce de façon réaliste, les visages et les corps sont généralement peu agréables à l’œil, trop sommaires, dénotant un certain amateurisme et un manque de fluidité dans le tracé, à de rares exceptions près. Tout cela est heureusement compensé par un cadrage approprié soulignant par ailleurs l’aspect poétique du récit.
Quant au scénario, il permet de faire passer au second plan ces imperfections graphiques. Plutôt intriguant et généralement bien construit, malgré une tendance à l’éparpillement vers la fin, ce conte possède également des qualités littéraires, le titre faisant d’ailleurs référence au célèbre écrivain américain Mark Twain, lequel travailla lui-même sur un bateau à vapeur du Mississipi jusqu’à la guerre de Sécession. L’emprunt au mythe des sirènes devrait faire tomber la plupart des lecteurs sous le charme de cette histoire, sans aller toutefois jusqu’à les retenir captif de ces créatures légendaires. Il ne s’agit en outre que d’une bande dessinée, il n’y a donc aucun risque d’entendre leur chant, à moins d’être doté d’une imagination débordante… En ce qui me concerne, je reste trop mitigé sur le dessin pour être vraiment séduit.
Sailor Twain ou la sirène dans l’Hudson
Scénario & dessin : Mark Siegel
Editeur : Gallimard
400 pages – 25 €
Parution : 17/01/2013