
A l’âge de 27 ans, Riad Sattouff avait décidé, bien avant L’Arabe du futur, de se replonger dans ses années boutonneuses dont apparemment il gardait un souvenir ému (à moins qu’il n’ait été carrément traumatisé…), en passant quelques jours dans un collège parisien. Par le plus grand des hasards, le premier qui acceptera sa requête (du bout des lèvres tout de même) sera le lycée Charles-Henri, l’archétype même du lycée de « bourges » dont le vrai nom a été modifié pour les besoins du récit… Il nous offre ainsi un témoignage décalé et plein d’humour, où remontent parfois à la surface ses propres souvenirs de lycée…
Avec ce Retour au collège, j’ai passé un excellent moment avec souvent le sourire aux lèvres et parfois des fous rires. Pour moi, ces « pattes de mouche » évoquent les griffonnages dessinés discrètement par tout un chacun au coin d’une page lors d’un cours soporifique. Aucune case, aucun scénario ne viennent fixer de cadre à cette BD qui se veut indisciplinée – peut-être comme un pied de nez de l’auteur à des profs sans pitié. Il faut donc plutôt lire cet ouvrage comme un assemblage de fragments les plus marquants de son passage à « Charles-Henri ».
La sincérité du propos réussit parfaitement à faire oublier le minimalisme du trait (bien souvent ce ne sont que des visages qui sont représentés, beaucoup plus rarement un décor, mais Riad Sattouf n’oublie pas les points noirs sur les visages et les appareils dentaires !), et ça, c’est très fort, car on est vraiment dedans (moi en tous cas !), comme l’auteur lui-même, directement replongé dans nos années ados. Qu’il s’agisse des situations, des profs ou des élèves, tout cela paraît incroyablement familier (on a tous eu des « filles molles » ou un « mec à nanas » dans notre classe), et quand bien même cela se déroule dans un des lycées les plus huppés de Paris.
Attention, ici pas de tendre nostalgie façon Diabolo menthe ou de farces potaches outrancières comme dans les Sous-doués. On est dans le vécu, le réaliste… Sattouf raconte TOUT : la cruauté, la stupidité, le bagout et l’insolence des teenagers, avec un trait faussement naïf et un regard pour le moins mordant. Lui-même ne se fait pas de cadeaux, et se représente dans l’histoire tel un ado maigrichon et voûté, comme s’il n’avait jamais quitté sa timidité pubère… Cette « obsession du collège », comme il le dit à la fin du récit, a trouvé en cette BD un exutoire que pourront redécouvrir ceux qui ont apprécié L’Arabe du futur.
Retour au collège
Scénario & dessin : Riad Sattouf
Editeur : Hachette Littératures
95 pages – 12,50 €
Parution : 31 août 2005