Routine de l’hémoglobine

Homicide, une année dans les rues de Baltimore – tome 3 : 10 février – 2 avril 1988 © 2018 Philippe Squarzoni (Delcourt)

Un flic a reçu deux balles dans le visage. Pas d’arme. Pas de mobile. Pas d’indices matériels. Mais Terry McLarney a été le sergent de Cassidy. Son ami. Et il fera tout pour découvrir le coupable. Alors que l’affaire Latonya Wallace accapare toujours Landsman et Pelligrini, le tableau se couvre d’encre rouge. Les corps s’empilent, le taux de résolution plonge et la pression augmente…

i les deux premiers tomes pouvaient susciter l’intérêt de ce reportage au sein de l’unité des homicides de Baltimore en 1988, adapté du livre de David Simon à l’origine de sa série The Wire, ce troisième tome n’apporte pas grand-chose à l’ensemble malgré une documentation toujours aussi fouillée. Bien sûr, on comprend que le travail des flics, confrontés à une prolifération des meurtres pour lesquels les indices se révèlent trop souvent clairsemés, dans un contexte de pression des résultats avec des moyens humains insuffisants, peut s’avérer un véritable chemin de croix.

On ne saura reprocher à Philippe Squarzoni la qualité de cette adaptation sur de nombreux points : d’une intelligence et d’une précision remarquables, avec un souci d’authenticité et de fidélité à l’œuvre originale, le tout renforcé par un cadrage vivant et pertinent. De même, Squarzoni se donne le temps pour coucher sur ses planches le propos de David Simon, en évitant soigneusement le piège du spectaculaire, ne montrant que la routine des inspecteurs, entre interrogatoires et lieux du crime où reposent les cadavres encore tièdes. Le problème, c’est qu’à force de vouloir trop bien faire, on risque parfois de prendre une direction qui ne se révèle pas forcément la bonne. Dans le cas présent, Homicide a les défauts de ses qualités. L’abondance d’explications et de textes finit par diluer le tout dans une sorte de brume narrative un peu fastidieuse, et même si l’on sait qu’on est à des années-lumière des clichés hollywoodiens, on aurait pu espérer au moins un vrai moment fort dans ce troisième chapitre. Peut-être l’auteur aurait-il dû tout simplement faire plus court.

Cela étant, il n’est pas dit que l’œuvre ne trouvera pas son public (si ce n’est déjà fait), au premier rang duquel les passionnés d’enquêtes policières ou les personnes attirées par les métiers dans la police. Au risque pour ces dernières de ne pas y trouver la motivation nécessaire, même si cela ne concerne qu’une ville américaine…

Homicide, une année dans les rues de Baltimore – tome 3 : 10 février – 2 avril 1988 (série prévue en 5 tomes)
Scénario & dessin : Philippe Squarzoni
D’après Homicide : A Year on the Killing Streets, de David Simon
Editeur : Delcourt
tome 3 : 160 pages – 18,95 €
Parution : 28 février 2018

Homicide, une année dans les rues de Baltimore – tome 3 : 10 février – 2 avril 1988 © 2018 Philippe Squarzoni (Delcourt)

Extrait p.136-138 :

« Le temps passé en salle d’interrogatoire peut porter atteinte à la crédibilité d’une confession. Il faut parfois des heures pour casser la résistance d’un homme et l’amener à confesser un crime. Dans le meilleur des cas, il faut bien quatre à six heures pour obtenir des aveux. Parfois, huit à dix heures peuvent être nécessaires. Mais à partir d’un certain stade, les heures commencent à compter double. Et après une douzaine d’heures en salle d’interrogatoire, même un juge compréhensif aura du mal à considérer qu’une confession soit entièrement volontaire.

Quand vient l’épilogue, il y a cet instant critique. Le coupable est sur le point de craquer. Juste avant qu’il n’abandonne sa vie et sa liberté… son corps s’incline. Certains posent la tête sur la table. D’autres se sentent mal. A ce moment-là, les inspecteurs disent à leurs suspects qu’ils sont malades. Malades de mentir. Malades de se cacher. Ils leur disent qu’ils se sentiront mieux s’ils commencent à dire la vérité. De façon très surprenante, beaucoup le croient. Ils cherchent à s’accrocher au bord de cette fenêtre, là-haut.

« C’est lui qui t’a agressé, hein ? »
« Oui, c’est lui qui m’a agressé. »

Et l’échappatoire les envoie au trou. »

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