
Dans cette biographie dédiée à Tomoji Uchida, une femme connue au Japon pour avoir créé un temple bouddhiste de la région de Tokyo, Jirô Taniguchi a choisi de se concentrer sur sa jeunesse. A partir de données éparses sur la vie de cette femme, l’auteur a eu recours à la fiction, délaissant la période postérieure sur le temple et sa création.
De son trait d’une infinie délicatesse, Jirô Taniguchi évoque la jeunesse de cette femme élevée par sa grand-mère, une jeunesse entrecoupée d’épreuves familiales douloureuses. L’auteur de Quartier lointain s’est par ailleurs centré sur la vie rurale dans le Japon de l’ère Taishô (1912-1926), en décrivant avec bienveillance le quotidien, l’indicible, les gestes et les regards de ces hommes et de ces femmes à la vie simple et humble. Par petites touches, il parle aussi de l’éveil du sentiment amoureux et du passage à l’adulte chez la jeune Tomoji. La narration pourra paraître assez banale, presque mécanique et aux frontières du mélo (on a presque du mal à croire que la fillette ait eu à affronter la mort de deux membres de sa famille et la fuite de sa mère). Mais comme dans l’œuvre précitée de Taniguchi, il se dégage une douce poésie de ce récit.
A l’image de la couverture représentant la fillette en train d’admirer le paysage, Elle s’appelait Tomoji est avant tout une œuvre contemplative où, comme souvent chez son auteur, la nature tient une place importante. Il ne faudra pas chercher une histoire au scénario bien ficelé, encore moins un récit fait de rebondissements à couper le souffle. Bien au contraire, au lieu de nous le couper, ce souffle, Jirô Taniguchi nous propose de l’écouter, dans un mode méditatif, avec ce récit lent et très épuré où le temps n’est rythmé que par les saisons, respectant ainsi l’esprit zen de Tomoji Uchida. L’ouvrage étant loin d’être un achat indispensable (à l’inverse de Quartier lointain), on pourra se contenter de l’emprunter en bibliothèque.
Elle s’appelait Tomoji
Scénario & dessin : Jirô Taniguchi
Éditions Rue de Sèvres
175 pages – 17€
Parution : 21 janvier 2015