
Écrasé par la chaleur, le vieux break fonce sur l’autoroute. Vincent, la trentaine, vient de tenter un gros coup de poker. Assis à côté de lui, un vieil homme, Abel. Il a traversé le siècle, ses contradictions et ses errements. Ces deux types n’ont rien en commun. Pourtant, ensemble, ils foncent vers des ennuis et des désillusions qu’ils n’auraient pas imaginés dans leurs pires cauchemars. Heureusement, sur leur route, il y a Rose, une jeune femme sans attaches, ni a priori… [Résumé éditeur]
Ce road-movie à la française déçoit de la part d’un auteur comme Etienne Davodeau que personnellement j’affectionne. On retrouve évidemment les thèmes favoris de l’auteur, humaniste convaincu et contempteur des extrémismes et d’un monde dominé par l’argent et la cupidité. Son dessin faussement imparfait possède toute l’âpreté qu’il faut pour coller à cette histoire pas franchement gaie, et son style de découpage, dynamique, fonctionne toujours plutôt bien. Pourtant, si l’idée de départ est bonne, on a l’impression que Davodeau s’est quelque peu égaré en suivant la vieille R18 des protagonistes… J’ai par moment ressenti une certaine lassitude, alors qu’en général il m’embarque facilement dans ses récits. Les deux passages censés être les points d’orgue de l’histoire sont atténués par une trop grande volonté démonstrative et du coup l’effet de surprise ne fonctionne pas à plein.
Quant à cette histoire de course-poursuite autour d’un trafic d’uranium, tout ça est un peu « too much ». Au bout d’un moment, on a peu l’impression que ça tourne en rond. Même si les personnages d’Abel et Rose sont attachants, ça ne suffit pas à rendre le récit captivant. Et puis cette fin en pointillés m’a laissé sur ma faim. De toute façon, on imagine mal un tueur à gages saisi par des états d’âme alors qu’il s’apprête à tuer sa cible, juste parce qu’une jeune fille qu’il ne connaît pas lui dit que c’est pas bien de tuer les gens…
Pour parler de « constat », c’est globalement peu concluant. Davodeau a voulu narrer en mode thriller la rencontre hasardeuse entre deux hommes qui n’ont presque rien en commun, si ce n’est de se rapprocher à toute vitesse d’un destin fait de déconvenues. Une histoire d’êtres humains à laquelle il manque juste le rythme et la tension. Un mélange des genres raté. Dommage de la part d’un auteur qui sait généralement bien convaincre ses lecteurs. (nov. 2012)
Le Constat
Scénario & dessin : Etienne Davodeau
Editeur : Dargaud
100 pages – 15,99 €
Parution : 29 janvier 2015