
Le parcours d’Olympe de Gouges, femme de lettres et pionnière féministe dans la France des Lumières, est retracé dans cette biographie très détaillée, de sa naissance à sa mort tragique sous la Terreur. L’auteure de la « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne » ne manquait pas de courage, usant de sa plume pour tenter d’amener le pouvoir révolutionnaire à ses vues.
C’est un portrait très documenté d’une femme aussi remarquable qu’héroïque que nous livrent Catel Muller et José-Louis Bocquet. La belle libertine érudite ne craignait pas de briser les conventions et de se dresser contre toutes les injustices (notamment l’esclavage) dans une société encore très patriarcale. Issue d’un milieu bourgeois et née d’un père noble dont la paternité ne fut jamais attestée, Olympe de Gouges, présentée ici comme une femme tolérante et d’un abord aimable, militait néanmoins ardemment pour les causes qu’elle épousait, la première d’entre elles étant les droits des femmes. Cette Girondine qui s’opposait à la guillotine pour le couple royal n’échappa pas elle-même aux fourches caudines et sanglantes des Montagnards. Cette biographie au long cours dévoilant la vie familiale et intime de De Gouges nous entraîne également au cœur des grands événements annonçant la Révolution, jusqu’en 1793, année funeste pour la passionaria des Lumières. On y croise les grandes figures de l’époque : Rousseau, Voltaire, Mirabeau, Benjamin Franklin…
Inhabituellement peu académique pour ce gendre de fresque historique, le trait en noir et blanc de Catel, tout en modestie, ne recherche pas la performance. Plutôt agréable et d’une tournure généreuse, ses quelques imperfections sont compensées par un souci du détail. De même, l’absence de recherche dans le cadrage ou la mise en page s’efface devant un attachement certain à restituer la réalité historique.
D’un point de vue narratif, le récit, assez linéaire et presque scolaire, aurait sans doute gagné à être plus resserré, s’égarant parfois dans des anecdotes un brin futiles. De même, un grand nombre de personnages parcourent l’histoire au risque de perdre le lecteur peu chevronné dans le domaine historique, même si celui-ci a la possibilité de se rattraper avec les notices biographiques et autres annexes à la fin du livre (80 pages tout de même).
On conçoit bien qu’ Olympe de Gouges soit l’hommage de deux admirateurs qui y ont mis tout leur cœur et l’ont voulu exhaustif et appliqué, peut-être au détriment de l’émotion. Et si l’œuvre risque de décourager les profanes les plus paresseux, il ne fait aucun doute qu’elle ravira ceux qui se passionnent pour les grands personnages historiques. Moi qui me situe entre les deux, je suis ravi d’en avoir appris un peu plus sur cette femme illustre dont je ne connaissais que le nom, ainsi que sur les événements de cette période.
Olympe de Gouges
Scénario : José-Louis Bocquet
Dessin : Catel Muller
Editeur : Casterman
Collection : Ecritures
400 pages – 24 €
Parution : 14 mars 2012